Evaluation et humiliation : une question à investir

J’ai eu l’occasion de déplorer les approches qui condamnent l’évaluation en général au lieu de l’investir pour la transformer quand ses outils ou ses effets sont problématiques. L’évaluation dans le domaine scolaire est un domaine dans lequel cette question est centrale. Une émission passionnante avait été consacrée par France Culture au sujet…

On y entend particulièrement Pierre Merle auteur de « L’élève humilié. L’école : un espace de non-droit ? » (PUF, 2005) dont l’approche du sujet, à la fois nuancée et comparative et sensible aux effets de l’évaluation dans ses outils actuels…est vraiment intéressante.

Même si beaucoup de ces notions sont maintenues connues, on y entend notamment que

  • des élèves qui sont incapables de réaliser une figure dans un cours au sein duquel ils ont de mauvaises notes, la réalisent dans le contexte d’un cours dans lequel ils n’ont pas cette étiquette de mauvais élève…
  • la Finlande pratique des notations de 4 à 10…permettant aux élèves qui sont en dessous (les 4) de garder espoir de retrouver la moyenne tandis que ceux qui attrapent un 2 /20 dés le début de l’année savent dés le début qu’ils n’auront jamais la moyenne quels que soient les efforts qu’ils développent ;
  • l’indicateur note (évaluation sommative) polarise presque totalement l’attention tant des bons élèves que des mauvais…en gommant presque totalement l’appréhension de ce qu’il faudrait faire pour s’améliorer (évaluation formative)

Sans même évoquer tous les arguments produits dans le cadre de la docimologie qui montrent depuis des décennies la multiplicité des biais qui affectent les pratiques de notation, un questionnement de ces démarches dans les effets qu’elles produisent me parait essentiel, si on pense que l’éducation n’a pas d’abord pour fonction de produire de la sélection et de la compétition…et si on supporte mal d’observer année après année à quel point l’éducation qui constitue pourtant l’avancée la plus significative d’une société peut se transformer – volens nolens – en machine à produire du ressentiment et de l’inadaptation.
Même si le précédent des rythmes scolaires ne rend pas très optimiste quant à la capacité collective de la société française à se réformer (quand bien même, ce serait pour le bien de nos enfants…) ça n’est pas une raison pour déserter le débat.

En espérant qu’il puisse un jour diffuser sur d’autres formes de l’évaluation qui mériteraient d’être questionnées dans leurs effets et leurs présupposés…

Dans une période qui verra bientôt les démarches d’évaluation remaniées par la Haute Autorité de Santé, c’est une question qu’on espère voir abordée : que fait l’évaluation à l’action ?

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *